Travaux Universitaires

This book promises to appeal to longtime readers of Nimier as well as newcomers to her writing. The collection of well-written essays offers creative and compelling readings of Nimier’s work that can serve to introduce readers to the author’s contributions to the field of autofiction, gender, and memory, to name only a few themes, or prompt new areas of inquiry for established researchers of her work. What is more, the inclusion of creative works not only allows readers to discover Nimier’s newest texts, but also reflects the creative energies of an author whose writing project includes song, theatre, and dance. The volume balances the delicate undertaking of paying homage to and shedding critical light on Nimier’s books. Above all, it demonstrates the protean nature of her work and the dynamic readings her books, be they her first novels or most contemporary pieces, continue to inspire.Ce volume prĂ©sente quatorze Ă©tudes critiques sur l’Ɠuvre de Marie Nimier, rĂ©digĂ©s soit en français, soit en anglais, dont certains ont leurs origines dans des communications du colloque Marie Nimier qui a eu lieu Ă  Londres en juin 2017. Y figurent en particulier quelques lectures de ses Ă©crits de la derniĂšre dĂ©cennie: Je suis un homme, La Plage, Les Confidences. À ces travaux d’universitaires s’ajoutent deux inĂ©dits de Marie elle-mĂȘme.

«This diverse collection casts much-needed light on Marie Nimier’s corpus and does full justice to the complexity and richness of Nimier’s writing.» (Professor SiobhĂĄn McIlvanney, King’s College London)

Marie Nimier’s writing abundantly exemplifies this «return of the subject» in the rich diversity of the fifteen novels she has published since SirĂšne in 1985, blending fiction and life-writing. Her narrators/protagonists typically strive to achieve forms of agency which are made possible, yet also threatened, by the ostensible «givens»: heritage, memory, gender, relationships, desire, social environment and, not least, language itself. This volume explores central aspects of self and subject in her oeuvre to date and includes two short stories which Nimier formally publishes here for the first time, one with an English translation.
Marie Nimier’s recent novels, Photo-Photo (2010), La Plage (2016), and Le Palais des orties (2020)1 highlight the role of a natural ecology in a protagonist’s search for reconciliation with a traumatized self that leads, often, to reparation with a troubled past. La Plage, in particular, places the natural world at the heart of the heroine’s quest by juxtaposing her personal catastrophes with those wrought by the Anthropocene on the planetVoilĂ  plus de trente ans que Marie Nimier Ă©crit. Des romans, de l’autobiographie, de l’autofiction, des piĂšces de thĂ©Ăątre, des chansons, des albums pour enfants. Son Ɠuvre romanesque se distingue par une grande maĂźtrise, une virtuositĂ© dans la structure narrative, une capacitĂ© Ă  Ă©chafauder des romans dĂ©concertants qui Ă©chappent souvent aux classifications. Le Palais des Orties est un texte qui peut se lire Ă  plusieurs niveaux. Au-delĂ  du suspense, au-delĂ  de la description des bouleversements intimes qui vont transformer Nora, il propose une plongĂ©e dans un milieu social peu mis en scĂšne en littĂ©rature, auquel Nimier sait confĂ©rer une vraie complexitĂ©. À la croisĂ©e de la littĂ©rature, de l’analyse du discours, de la psychanalyse, de la psychologie et des thĂ©ories sur le trauma, Écrire les Blessures de l’enfance. Inscription du trauma dans la littĂ©rature contemporaine au fĂ©minin explore en dĂ©tail l’inscription textuelle des traumas de l’enfance Ă  travers l’étude d’Ɠuvres autobiographiques et autofictionnelles d’auteures reconnues telles que Chantal Chawaf, ChloĂ© Delaume, Marguerite Duras, Marie Nimier aux cĂŽtĂ©s de nouvelles voix comme BĂ©atrice de Jurquet et Colette Mainguy. Vers quelles stratĂ©gies textuelles et quels procĂ©dĂ©s littĂ©raires se tourner pour tĂ©moigner de la nature obsessionnelle du trauma? Le passage Ă  l’écriture et Ă  la remĂ©moration des souvenirs permet-il Ă  l’écrivaine de sortir de l’impasse mentale causĂ©e par l’évĂ©nement traumatique? Cet ouvrage examine diffĂ©rentes reprĂ©sentations du trauma et propose de nouvelles perspectives ainsi que des rĂ©ponses et des rĂ©flexions sur cet aspect de l’écriture des femmes qui s'avĂšre ĂȘtre un espace propice pour rĂ©vĂ©ler des histoires de honte, de culpabilitĂ© et de violence.A novelist with a long-standing involvement in the performing arts, Marie Nimier published in 2005 Vous dansez?, a collection of nine short fictional texts written as part of a collaborative venture with the dancer-choreographer Dominique Boivin to form the basis for a series of performance pieces. The intensity and sustained interaction between writer and dancers which informed these writings confers on them a particular transgeneric status, termed here ‘chorĂ©-rĂ©cits’, as texts originally for dance performance and now for reading. The accounts emerging from interviews with the dancers about the factors shaping their career and their art frequently laid bare the constraints, both personal and professional, which through dance they sought to express or transcend, a feature which resonates with Nimier’s own abiding exploration of social, familial and interpersonal politics. More fundamentally, the hybrid focus of the collection nourishes a sustained and suggestive reflection on the relationship between verbal and gestural language and art. Par ses procĂ©dĂ©s de ‘mise en scĂšne’ et de thĂ©ĂątralitĂ©, Anatomie d’un chƓur, troisiĂšme roman de Nimier, s’annonce comme une sorte de comĂ©die qui raconte l’heureux aboutissement d’un amour adultĂ©rin et la rĂ©alisation rĂ©ussie d’une Ɠuvre musicale faussement attribuĂ©e. Au-delĂ  de ce jeu de mensonges publiques et de passions authentiques se rĂ©vĂšlent les rouages de la crĂ©ation artistique et de la recherche de la plĂ©nitude personnelle. Les trajets suivis par les principaux personnages passent par un milieu dĂ©bordant de dĂ©sirs fluctuants, souvent dissimulĂ©s ou inavouĂ©s, qui finissent par animer un drame Ă  fortes rĂ©sonances mythiques qui semble exiger un tribut Ă  payer aux puissances malĂ©fiques, le versant noir nĂ©cessaire Ă  l’issue heureuse sur les plans esthĂ©tique et passionnel. Marie Nimier’s Je suis un homme has received little critical attention to date, but deserves close analysis in particular for its rich network of intertextual references to (amongst others) Joyce, Diderot, Modiano and Nimier herself. Such ‘palimpsestuous’ allusions (Genette) enjoin the reader to keep in mind two texts at once and thus to ‘lire double, comme parfois on voit double’ (Lecarme). This paper will concentrate on two brief, apparently casual references in Je suis un homme to Modiano’s Les Boulevards de ceinture and La Place de l’étoile, both of which feature a cast of double agents and dual personalities as well as the fractured relationship between a father and son. Our analysis will demonstrate that the Modiano intertexts present us with a ‘doubling’ not only of Nimier’s protagonist and his father, but also (allusively, subtly, indeed ‘silently’, for the relevant aspects of the intertext are entirely implicit) of the author herself and her problematic father, Roger. Juxtaposing this finding with one further, unnamed intertext (Il Ă©tait une fois dans l’Ouest), we shall consider Nimier’s intertextual strategy as a form of revenge for her father’s famous question ‘Que dit la Reine du Silence?’. En Ă©cho au titre Corps du roi, que Pierre Michon entendait trĂšs clairement au pluriel, nous proposons le titre « Les Corps de la Reine » pour explorer les reprĂ©sentations du corps dans le premier roman publiĂ© par Marie Nimier et dans son rĂ©cit de filiation, publiĂ© une vingtaine d’annĂ©es plus tard. Dans ces deux titres, on entend d’ailleurs, au moins phonĂ©tiquement, le mot « reine » et la narratrice de SirĂšne conjoint d’ailleurs les deux surnoms de « Reine du silence » et de « SirĂšne des pompiers ». Les deux premiers prĂ©noms officiels de cette narratrice sont Marine et CĂ©line, mais elle y entend « Marine c’est Line ». Line Ă©tant le prĂ©nom prĂ©fĂ©rĂ© de sa mĂšre et Marine celui que son pĂšre souhaitait qu’elle porte, on peut lire dans cette double postulation contradictoire entre pĂšre et mĂšre une menace de tension semblable Ă  celle que doit assumer puis dĂ©passer le saint Julien de Flaubert. En outre, Marine, si proche du prĂ©nom de l’auteure, fait rĂ©fĂ©rence Ă  un corps aquatique, tandis que Line fait rĂ©fĂ©rence Ă  un corps terrestre : le roman nous apprend en effet qu’en Bretagne le lin, considĂ©rĂ© comme la suprĂȘme panacĂ©e, se prononce « line ». Nous nous intĂ©resserons Ă  ce dĂ©doublement en tentant de montrer Ă  quel point, dans ces deux ouvrages, la reprĂ©sentation du corps est placĂ©e sous le signe des contes et relĂšve de l’inconscient. La condition du vivant reprĂ©sente de plus en plus un souci scriptural chez Marie Nimier. Face Ă  l’animalitĂ© et Ă  la minĂ©ralitĂ© qui permettent l’exploration tant des ressources que des limites de la matiĂšre afin de s’approcher de l’humain, l’imaginaire de cette Ă©crivaine est attirĂ© par le vĂ©gĂ©tal au moment oĂč il s’agit de constituer un « rĂ©seau bio » capable de configurer une « autre » vie possible et de rendre compte de toute cohabitation entre les espĂšces. La complexitĂ© des relations se traduit ainsi en effet littĂ©raire lorsque les dĂ©tournements, les changements de posture et la souplesse narrative dĂ©fient l’immobilitĂ© des mĂ©canismes identitaires – comme dans le cas d’une mine, espace de l’inanimĂ© et source de vie Ă  la fois, ou de la plage aux prises avec la notion d’invisible, comme dans l’exemple des animaux parlants et notamment dans la vĂ©gĂ©talisation des configurations spatiales. Dans ce contexte, les plantes jouent un rĂŽle essentiel et controversĂ© qui, entre prĂ©sentation et reprĂ©sentation, vĂ©gĂ©tal et vĂ©gĂ©tatif, interroge une Ă©criture attentive Ă  la dimension prĂ©caire de l’existence humaine. Pourquoi ces pages ont-elles recours Ă  une main verte pour rendre l’impact avec l’humain? Cette communications vise Ă  analyser le statut du vĂ©gĂ©tal dans les romans de Marie Nimier en tenant compte de toutes ses ramifications et Ă  en saisir la spĂ©cificitĂ© dans le cadre d’un poĂ©tique des doublures qui dĂ©voile la sensibilitĂ© d’un univers vert sous toutes ses facettes et avec toutes ses implications problĂ©matiques. In Photo-Photo, published in 2010, Marie Nimier stages the play of binaries through a series of ocular metaphors. As the title suggests, both semantically and typographically, the two photos that bookend the text stage the hyphen as an in-between space of two framed representations. A stylistic departure from her preceding novels, Photo-Photo teems nonetheless with techniques familiar to Nimier readers: doubles, mortality, fragile identities, paternal figures, and mirroring meta-textes and mises en abyme, to name just a few. Multiple frames in this novel express these themes, including the polar or detective story, not only as emblem of a search for identity (the “I”) but also, here, as ocular metaphor (“private eye”), a quest for a new “optique” or angle on enigmas troubling the narrative voice. A second frame concerns Freud’s essay on the uncanny. Numerous allusions in the novel to death, doubles, dolls, evil eyes, and childhood fears embed Freud’s essay as an overdetermined intertext. The third major frame is both thematic and structural. The kaleidoscope, a scientific instrument of optics but also magical toy, serves as metaphor for the aesthetic form of the narrative and its attempts to create new assemblages from bits and pieces of other texts, rendered in bursts of colors, shattered words, and narrative and lexical fragments. The kaleidoscopic turn of the novel casts new angles of vision on the play of identity and difference, the unseen and the unsaid. D’une reine silencieuse Ă  la reine des mots, Marie Nimier franchit le pas. Faire silence n’est autre qu’écouter. Écouter paraĂźt ĂȘtre un moyen de se mettre en attente pour dire Ă  son tour. Dans Les Confidences, Marie Nimier prĂȘte l’oreille Ă  des voix, devient la voix des autres. Mais que reste-t-il de la voix de Marie Nimier lorsqu’elle se fait porte-parole d’un ensemble. C’est l’anatomie du chƓur de ces confidences que je souhaite Ă©tudier dans cette communication : rechercher la voix de Marie Nimier derriĂšre celles, nombreuses et puissantes, de ceux qui se confient Ă  elle. Que reste-t-il de la part de chacun ? Comment le style de Marie Nimier, ses thĂ©matiques de prĂ©dilection, son identitĂ© littĂ©raire s’éclairent-ils derriĂšre le miroir de l’autre ? Marie Nimier semble trouver son double dans les confidences qu’elle recueille dans son nouveau livre. À la maniĂšre du sosie rencontrĂ© Ă  Baden-Baden, elle capte dans les aveux des candidats une part d’eux-mĂȘmes qui n’est autre qu’un miroir tendu. Cette analyse portera sur le style des Confidences, ou sur la question d’une seule voix pour dire des voix. DĂšs l’épigraphe de La Plage, Nimier communique une forme d’injonction au lecteur : « Pour qu’une chose soit intĂ©ressante, il suffit de la regarder longtemps. Gustave Flaubert. » Elle nous donne la position privilĂ©giĂ©e d’observateurs. Il faudra alors s’attarder sur le mot plage, voir se dĂ©ployer le spectre de ses multiples signifiĂ©s dĂ©notatifs et connotatifs, et lire le livre au rythme qu’elle vient de suggĂ©rer. Plus loin, alors que l’histoire de La Plage monte en puissance, l’auteure met en place un processus d’épuration, un Ă©grenage qui remonte jusqu’à l’essentiel, met Ă  nu et devient, chemin faisant, source de rĂ©gĂ©nĂ©ration. Capable d’enfanter, de multiplier toute histoire, ce processus touche ici autant le personnage dans sa vie que l’auteure dans son Ă©criture. D’une part, je m’attacherai Ă  la polysĂ©mie du mot plage pour montrer qu’il peut s’accompagner d’un phĂ©nomĂšne de confusion de tout imaginaire avec celui de l’auteure. Dans ce contexte, je verrai l’auteure outrepasser les limites de la fiction et de la rĂ©alitĂ©, se passer des barriĂšres spatio-temporelles et langagiĂšres, superposer forme et histoire, et de ce fait, dĂ©velopper une Ă©criture hors normes, entre confusion, dĂ©mesure, dĂ©fi et superposition, en quelque sorte, une Ă©criture transgressive. D’autre part, m’appuyant sur le concept de transtextualitĂ© de GĂ©rard Genette, j’exposerai que Marie Nimier explore la transtextualitĂ© jusqu’à faire tomber les bornes de l’hypertextualitĂ©, se dĂ©barrasse des mots qui l’ont hantĂ©e depuis son enfance, qui l’ont enfermĂ©e dans l’histoire de la Reine du silence et aussi son histoire, de mĂȘme qu’ils ont enfermĂ© dans leurs histoires respectives les personnages qu’elle a dĂ©jĂ  imaginĂ©s. Enfin, je proposerai que cette dĂ©marche libĂšre de façon surrĂ©aliste les mots et les histoires de leurs entraves, et ouvre un espace de crĂ©ation individuel et collectif susceptible, Ă  son tour, de mĂ©tamorphoser les personnages et les histoires. Le choix de la premiĂšre personne pour raconter n’est jamais neutre, surtout quand dans l’ensemble de l’Ɠuvre, certains ouvrages relĂšvent du genre strictement autobiographique. L’Ɠuvre de Marie Nimier offre un riche terrain d’observation : sur treize romans publiĂ©s, dix sont Ă©crits Ă  la premiĂšre personne, et quatre d’entre eux sont des autobiographies. Il s’agira d’étudier les diffĂ©rents dispositifs Ă©nonciatifs utilisĂ©s afin de dĂ©gager la tonalitĂ© autobiographique des rĂ©cits, qui racontent tous une quĂȘte identitaire. Cette identitĂ© n’est jamais certaine : floue et flottante, elle s’incarne dans diffĂ©rents jeux de dĂ©doublements, Ă  l’image d’une duplicitĂ© rĂ©alitĂ©/fiction sur laquelle l’auteur joue constamment. Et c’est Ă  l’écriture alors de faire le « point », d’élucider l’énigme identitaire et d’apporter une forme d’apaisement. À partir d'une sĂ©ance photo commandĂ©e par « Paris Match » Ă  Karl Lagerfeld en 2008 pour cĂ©lĂ©brer les Ă©crivains de la rentrĂ©e, dont Marie Nimier, Photo-Photo se fait le rĂ©cit d'un inattendu roman en train de s'Ă©crire sous les yeux du lecteur. L’autoportrait en mouvement, entre passĂ© et prĂ©sent, d'une femme "rĂ©inventĂ©e" par Lagerfeld, posant devant son objectif, se fait prĂ©texte pour mettre en scĂšne l’histoire de l’écriture de ce roman. Comment la fiction investit et travestit la rĂ©alitĂ© dans un texte oĂč elles s’allient, puisant tant dans l’intime d’un individu que dans l’acte de la crĂ©ation littĂ©raire elle-mĂȘme ? Ne serait-ce une affaire de vision concernant moins la reprĂ©sentation de soi que le processus de l’écriture dont l’enjeu est de plonger au cƓur du geste de la crĂ©ation, pour donner Ă  voir cette « toile impressionnante, qui aurait pu ĂȘtre considĂ©rĂ©e comme l’Ɠuvre mĂȘme, au-delĂ  du roman » (PH, p. 191) ? Ce qui dessine certainement le mieux l'oeuvre de Marie Nimier, ce sont les personnages dits, par commoditĂ©, secondaires. Par exemple, Huguette Malo, dans Photo-Photo. Un ce des personnages qui permettent d'attaquer une oeuvre par des chemins de traverse, une maniĂšre parmi les plus fĂ©condes pour pĂ©nĂ©trer l'univers de Marie Nimier. Son oeuvre est pleine de chemins de traverse, de bifurcations, de sentiers campagnards, de chemins perdus.Nous nous disons libre dans notre maniĂšre d’utiliser notre langue. Tout du moins nous en avons l’impression alors que nous connaissons des situations contradictoires Ă  cela. On se rend compte de problĂšmes de comprĂ©hension au sein de nos discussions quotidiennes, car derriĂšre l’emploi de mots commun nous ne mettons pas le mĂȘme ressenti, le mĂȘme sentiment, le mĂȘme sens. Ainsi, Ă  travers un discours dĂ©clamĂ© dans un temps donnĂ© est, une fois relu avec de la distance, vu comme erronĂ©. Pourquoi un rĂ©cit qui nous a paru vrai sonne soudainement faux ? Comment pouvons-nous nous retrouver face Ă  un double discours ? Marie Nimier, Ă  travers Celui qui court derriĂšre l’oiseau, La Reine du silence et Les insĂ©parables, nous pose la question de notre relation Ă  la langue pour parvenir Ă  se dire. Les questions de l’authenticitĂ©, du double rĂ©cit, l’importance du signifiant sont abordĂ©es dans les Ɠuvres de Marie Nimier. La Reine du silence s’ouvre sur une scĂšne d’accident qui conduit la narratrice Ă  un curieux aveux : « Il n’y a rien Ă  raconter. » Force est pourtant de constater que ce rien oĂč l’on craindrait voir le rĂ©cit sombrer, Ă  peine entamĂ©, n’empĂȘche pas la narratrice de trouver quelque chose Ă  dire. L’écriture part ainsi Ă  d’un silence fĂ©cond et c’est ce paradoxe que l’on situe au principe de l’Ɠuvre de Nimier. Du rien qu’on y observe on peut donner trois manifestations qui vont de la cassure des personnages jusqu’à l’écriture de cette cassure en passant par l’expĂ©rience d’un langage vidĂ© de sens. On constate alors que d’un rien Ă  l’autre, d’une insignifiance Ă  sa redite, le travail d’écriture se donne comme le lieu oĂč s’accomplit une singuliĂšre alchimie du sens. Ni roman, ni recueil, ni rĂ©cit, ni fiction, ni rapport, ni nouvelles, cet ouvrage transcende agilement les genres avec son “machin autour des confidences” pour faire converger transcription, description, inscription, prescription, souscription et mĂȘme proscription. Loin de n’ĂȘtre qu’une suite de confessions accolĂ©es les unes aux autres et sans aucun rapport entre elles, le texte s’harmonise grĂące Ă  la prĂ©sence de la narratrice qui y injecte une encre rĂ©ceptive et qui façonne un pan kalĂ©idoscopique de notre imaginaire.L’une des caractĂ©ristiques esthĂ©tiques de l’Ɠuvre narrative de Marie Nimier est sa capacitĂ© Ă  reflĂ©ter les questionnements qui l’habitent Ă  travers un jeu de doubles. Se posant comme Ă  l’affut d’elle-mĂȘme, l’Ɠuvre se profile Ă  travers autant d’avatars que de formes d’art : de la photographie Ă  la danse en passant par le thĂ©Ăątre, la musique, le dessin et l’écriture. Souvent portĂ©s par un personnage autre que le narrateur, ces langages se situent face Ă  la parole du narrateur, tel un miroir dĂ©formant oĂč l’écriture se mire, se reconnaĂźt mais aussi se voit dĂ©placĂ©e. Les Ă©tudes rĂ©unies dans cet ouvrage Ă©pousent, en l’explorant, cette diversitĂ© de perspectives et offrent une critique globale d’une Ɠuvre qui s’affirme de plus en plus dans le paysage littĂ©raire français.Tu uses, au terme provisoire de ta quĂȘte, de la botte de NoĂ«l comme celle de Nevers pour mettre Ă  mort enfin l'ambiguĂŻtĂ© de ton statut : parler ou se taire, tuer le silence ou faire taire le mort.Le (beau) risque d’écrire. Ces entretiens littĂ©raires menĂ©s par Karin Schwerdtner avec douze Ă©crivaines contemporaines de diverses origines – Annie Ernaux, Chantal Chawaf, Marie Nimier, Linda LĂȘ, Camille Laurens, CĂ©cile Oumbani, LeĂŻla Sebbar, Laurence NobĂ©court, HĂ©lĂšne Lenoir, Sylvie Germain, AgnĂšs Desarthe et Maryline Desbiolles – nous plongent d’entrĂ©e de jeu dans ce qu’est pour elles l’écriture, la lecture, la littĂ©rature ainsi que le risque qui y est associĂ©. Un parcours passionnant et passionnel anime ces femmes qui ont choisi de vivre avec le plus qu’incertain de l’écriture. In many life-writing projects, the seemingly innocuous description of heteroclite objects and how those objects are stored and recalled in fact plays an important role in demonstrating their importance to the process of memory work. At once the lingering traces of one’s past and also an aggregation of stories evoked by an examination of them, these curios focus attention on the relationship between the individual and the storage of memories. This article will focus on certain collectibles, collections and collectors that appear throughout the fictional, autobiographical and autofictional world that Marie Nimier has scripted to date. This textual cabinet of curiosities and the act of collecting more generally serve as a trope to connect memory with materiality, despite the numerous narrative voices that Nimier assumes—voices that move from a first-person “Marie Nimier” to an unnamed, although clearly identifiable first-person and even float between genders. Despite this nominal and narrational fluidity, objects function to guarantee recognition, both for the reader, and, especially, for the author herself. What is at stake in this intertextual assemblage of objects is not only the roles that they play in allowing the narrator to revisit past traumas and loss, but also in connecting the author’s presence to other, more fictionalized voices that above all signify the primacy of life-writing in her corpus.Dans son acception psychologique, « rĂ©miniscence » signifie « retour Ă  l’esprit d’une image dont l’origine (perception antĂ©rieure) n’est pas reconnue ». Plus joliment et plus expressivement, Joseph Joubert la dĂ©finissait dans ses PensĂ©es comme « l’ombre du souvenir ». Cet article se propose justement d’explorer tout un territoire d’ombres dans La Reine du silence, « rĂ©cit de filiation » – pour reprendre la terminologie de Dominique Viart – grĂące auquel Marie Nimier, en 2005, part courageusement, opiniĂątrement, Ă  la recherche du pĂšre que fut l’écrivain « hussard » Roger Nimier, tuĂ© dans un spectaculaire accident de voiture alors qu’elle venait tout juste d’avoir cinq ans. In its psychological sense, « reminiscence » means « return to the spirit of an image whose origin (previous perception) is not recognized ». More beautifully and more expressively, Joseph Joubert defined it in his PensĂ©es as « the shadow of memory ». In its psychological sense, « reminiscence » means « return to the spirit of an image whose origin (previous perception) is not recognized ». More beautifully and more expressively, Joseph Joubert defined it in his PensĂ©es as « the shadow of memory ». This article proposes to explore an entire territory of shadows in La Reine du silence, a « filiation’s narrative » – in Dominique Viart’s terminology – through which Marie Nimier, in 2005, courageously, obstinately, looks for what kind of father was the « hussar » writer Roger Nimier, killed in a spectacular car accident when she has just been five years old.Abstract L’univers romanesque de Marie Nimier se caractĂ©rise des rĂ©cits imaginatifs racontĂ©s par des voix narratives variĂ©es et amusantes. Combinant des Ă©lĂ©ments imaginaires avec un rĂ©alisme attentif Ă  la sociĂ©tĂ© française des annĂ©es ’80 jusqu’à nos jours, Nimier sait Ă©voquer un monde de fiction qui brouille les deux, un univers de rĂ©alisme fantasmĂ©. Dans le cas de son deuxiĂšme roman, La Girafe (1987), l’amour de Joseph, jeune gardien au zoo de Vincennes, pour sa charge, la girafe Hedwige, prend lieu dans une atmosphĂšre carnavalesque, inquiĂ©tante, et Ă©trangement comique. Nimier, en Ă©voquant le pervers polymorphe des identitĂ©s indĂ©cises et une abjection animale, pose la question des frontiĂšres floues entre soi et autrui, sujet et objet, dehors et dedans, animal et humain. Dans un roman de dĂ©doublements troublants, Nimier fait rĂ©flĂ©chir Ă  la question de l’exclusion sociĂ©tale de ceux qui nous font peur par leur diffĂ©rence.Now to be sure, there is a far darker side of La Girafe, too, and it is not my objective to repress it. Neither do I intend to insist upon it, however, because what interests me is the brighter tale of interspecies love around which the novel is organized. That tale does not leave me indifferent. I am not immune to it, I’ll confess. And I'll wager that I’m not alone. Think of this, though: we may be perched right ion the most tolerant edge of the country here in San Francisco, but I’ll remind you that it’s a country that views interspecies love with a very jaundiced eye indeed. So hush! Whatever we may say in this room stays in this room, okay? Just as if we were creature some novel, inhabiting, together, some fictional world. " Motte, Warren.Contemporary French and Francophone Studies. “On Interspecies Love and Canine Tauromachy: A Prolegomenon,” (Volume 16: issue 4) 571-584. 2012.” Reprinted by permission of the publisher (Taylor & Francis Ltd, http://www.tandf.co.uk/journals)Dans La Reine du silence, Marie Nimier se confronte Ă  la figure de son pĂšre, l’écrivain Roger Nimier, mort lorsqu’elle avait cinq ans. Elle y montre le poids qui pĂšse sur l’enfant d’écrivain, mais aussi celui de l’hĂ©ritage du secret familial et de l’injonction au silence. La difficultĂ© de l’élaboration de son rĂ©cit de filiation se rĂ©vĂšle dans les constants recommencements et reformulations, qui constituent la marque de la tension angoissante entre l’obligation de dire et celle de taire. In La Reine du silence, Marie Nimier confronts her father’s memory – the writer Roger Nimier, who died when she was five years old. The novel describes the burden of being a writer’s child, along with that of inheriting family secrets and submitting to a code of silence. The difficulty of recounting her relationship with her late father is evidenced by the narrator’s numerous “false starts” and her constant rewritings. The hesitant nature of the narration captures an anguish born of two irreconcilable obligations : the need to put things into words and the pressure to remain silent.Dans son article « Fiction et espace autobiographique chez Marie Nimier : de son premier roman SirĂšne Ă  son dernier, Les InsĂ©parables » Jeanne-Sarah de Larquier propose de parcourir l’écriture de Marie Nimier de SirĂšne aux InsĂ©parables Ă  la lumiĂšre des dĂ©finitions de Philippe Lejeune des roman et espace autobiographique tels qu’énoncĂ©s dans Le Pacte autobiographique. Je dĂ©velopperai comment jusqu’à La Reine du Silence Marie Nimier confronte narrateurs, modĂšles, et personnages fictionnels ou non pour confondre auteur, narrateur, et personnage en concluant un pacte autobiographique qui lui ouvre son propre espace autobiographique qu’elle animera dans Les InsĂ©parables. Note de l'Ă©ditrice : « Repetition with a Difference : Returning a Voice to the Little Mermaid in Marie Nimier’s SirĂšne and La Reine du Silence » de Deborah Gaensbauer montre que Marie Nimier se sert respectueusement mais parodiquement du conte de Hans Christian Andersen “La petite sirĂšne” alors qu’elle confronte l’expĂ©rience traumatisante d’ĂȘtre issue d’une famille qu’elle dĂ©crit comme « un conte de fĂ©e qui se termine mal ». Dans le conte d’Anderson, sorte de compromis vers une forme humaine qui implique et une perte et une mutilation de la parole, la petite sirĂšne reprĂ©sente d’une façon trĂšs contemporaine la synthĂšse Ă©chouĂ©e d’un soi divisĂ©. Nimier, surnommĂ©e « sirĂšne des pompiers » par sa mĂšre mais affectueusement tenue silencieuse par le titre « reine du silence » imposĂ© par son pĂšre mort dans un accident de voiture alors qu’elle n’avait que cinq ans, voit son identitĂ© Ă  la fois brouillĂ©e et amputĂ©e du fait de ce refus Ă  la parole qui lui est fait. Dans cet article Deborah Gaensbauer retrace le processus de l’écriture et de la rĂ©Ă©criture d’expĂ©riences traumatisantes comme une fusion nĂ©gociable avec un double de soi qui prend la forme d’une sirĂšne de conte de fĂ©e et qui permet Ă  Nimier de rĂ©cupĂ©rer sa voix dans La Reine du Silence qu’elle apprĂ©hende comme un roman explicitement autobiographique plutĂŽt que autofictionnel. PrĂ©sentation de l'Ă©ditrice, Jeanne-Sarah de Larquier Dans son article « Cultural Displacements in Marie Nimier’s La Girafe » Walter Putman examine le roman La Girafe dans le contexte d’un Ă©pisode emblĂ©matique dans la rencontre culturelle entre l’Afrique et l’Europe: l’arrivĂ©e en 1827 de la premiĂšre girafe sur sol français depuis l’antiquitĂ©. Nimier fait rĂ©fĂ©rence au conte historique de Zarafa, tandis que son personnage principal, Joseph, devient le gardien de la girafe de notre temps au zoo de Vincennes. Il s’identifie aussi Ă  l’un des gardiens de girafe prĂ©cĂ©dent alors que Marie Nimier tisse un conte sur l’identitĂ© post coloniale, la politique de la diaspora, et le dĂ©sir Ă©rotique. Walter Putman propose alors une lecture de La Girafe Ă  la lumiĂšre des relations humaines avec des animaux ou non–humains, notamment dans le contexte du dĂ©placement en masse de larges mammifĂšres africains dans les zoos et cirques d’Europe et d’AmĂ©rique du Nord. Putman s’intĂ©resse aux signifiants culturels impliquĂ©s par ces transfĂšres ainsi qu’à l’exhibition de ces animaux pour tenter de mieux comprendre les relations coloniales, et les perceptions du monde occidental des pays d’origine de ces animaux. Notamment, il note que la prĂ©sence d’espĂšces exotiques contribue Ă  un sens moderne de l’émerveillement et de la curiositĂ©. Dans le roman de Nimier, Joseph explore sa solitude et son Ă©trangetĂ© au travers de la perception qu’il a de sa relation avec la girafe. Putman s’attarde sur cet exemple pour discuter de la domination des humains sur les animaux et de certaines des façons dont ils sont rĂ©duits Ă  l’état d’objet pour satisfaire Ă  nos besoins personnels. Enfin, la girafe lui permet d’aborder les thĂšmes de la performance et de la circulation des animaux parmi les humains dans un contexte Ă  la fois historique et contemporain.PrĂ©sentation de l'Ă©ditrice L’article de Nora Cottille-Foley intitulĂ© « CorporĂ©itĂ© et mĂ©talepse dans La Nouvelle Pornographie de Marie Nimier » s’attache, quant Ă  lui, Ă  Ă©clairer l’aplatissement des espaces intra-diĂ©gĂ©tiques et extra-diĂ©gĂ©tiques Ă  l’Ɠuvre dans La Nouvelle Pornographie selon lesquels le texte prend corps tandis que le corps se rĂ©vĂšle n’ĂȘtre que langue et langage. Cottille-Foley montre que le texte est construit en une sĂ©rie vertigineuse de mĂ©tarĂ©cits qui, tels un chĂąteau de sable, s’aplatissent sous les coups de pelle en mĂ©talepse ludique assĂ©nĂ©s par une Ă©crivaine jubilante. Sous les dĂ©combres de cette transgression des niveaux du rĂ©cit, le roman nous donne Ă  comprendre que le Moi est un assemblage contradictoire de textes hĂ©tĂ©roclites dont font partie tout aussi bien la pornographie—dont les intĂ©rĂȘts capitalistes sont d’ailleurs dĂ©noncĂ©s—que les contes de fĂ©es—dĂ©noncĂ©s quant Ă  eux pour leur idĂ©ologie matrimoniale. Pour exprimer la problĂ©matique profusion contemporaine de messages stĂ©rĂ©otypĂ©s, l’auteur a recours Ă  l’image de la sirĂšne, dont elle avait dĂ©veloppĂ© les possibilitĂ©s narratives dans un roman prĂ©cĂ©dent, SirĂšne. Le dĂ©nouement de La Nouvelle Pornographie constate la dĂ©chĂ©ance des modĂšles antiques, alors qu’un briquet en forme de sirĂšne roule dans le caniveau, et fait retentir la discordance d’une irrĂ©conciliable polysĂ©mie tandis qu’un camion de pompiers emporte la narratrice dans la nuit, sous les hurlements d’une sirĂšne. PrĂ©sentation de l'Ă©ditrice : Dans son article « La Nouvelle Pornographie ou le corps-Ă -corps avec l’Ange du Foyer », Joёlle Papillon s’intĂ©resse au personnage auto-fictif de Marie Nimier qui joue au pornographique tout en se jouant du pornographique. La narratrice y dĂ©montre sa rĂ©sistance au pornographique par le biais de judicieux dĂ©placements sĂ©mantiques et symboliques, et par un usage de la rhĂ©torique qui permet de garder celui-ci Ă  distance. L’écriture pornographique demeure pourtant une source de dĂ©sir et de tentations pour la protagoniste, qui oscille entre fascination et rĂ©pulsion. Si elle s’approche de l’émotion pornographique, l’Ange du Foyer est prompt Ă  intervenir pour la censurer et la ramener sur le droit chemin de la dĂ©cence. A la clef de son analyse, Joёlle Papillon montre en quoi La Nouvelle Pornographie soulĂšve la question de la possibilitĂ© mĂȘme de l’existence d’une Ă©criture pornographique au fĂ©minin.Note de l'Ă©ditrice : Dans « Translating Marie Nimier », John Fletcher s’appuie sur son expĂ©rience en tant que traducteur de fiction contemporaine française et en particulier des travaux de Marie Nimier pour examiner les difficultĂ©s de traduction spĂ©cifiques Ă  ces derniers et mettre en valeur certains problĂšmes du traducteur, surtout quand il s’agit de trouver le registre et le ton justes pour faire passer celui du français de Marie Nimier. Pour ce faire, John Fletcher se sert d’extraits qu’il a traduits il y a plusieurs annĂ©es pour un Ă©diteur qui avait acquis les droits de publication pour la version anglaise de Celui qui court derriĂšre l’oiseau mais qui fut finalement dans l’incapacitĂ© d’exĂ©cuter l’accord fait avec Gallimard qui a alors rĂ©cupĂ©rĂ© les droits. Ensuite, il se tourne vers la traduction d’ « Un enfant disparaĂźt » que nous avions publiĂ©, lui et moi, en collaboration dans la Cincinnati Romance Review. Il discute enfin des quatre textes de Vous dansez ? qu’il a traduits pour le prĂ©sent volume qui prĂ©sentent leurs propres dĂ©fis pour le traducteur, mais pour lesquels il a eu la chance de pouvoir ĂȘtre en contact directement avec l’auteur pour obtenir ses conseils. Note de l'Ă©ditrice : L’article « (Re)Writing the Self: Identity and Intertextuality in Les InsĂ©parables » d’ Ana de Medeiros s’intĂ©resse Ă  la question de l’intertextualitĂ© de nombreux thĂšmes que l’on retrouve dans le dernier roman de Marie Nimier, Les InsĂ©parables, thĂšmes qui reprennent ceux dĂ©jĂ  abordĂ©s et approfondis dans les textes prĂ©cĂ©dents de l’écrivaine. Ainsi Marie Nimier Ă©crit SirĂšne en 1985, et c’est presque deux dĂ©cennies plus tard que dans La Reine du Silence, elle s’interroge sur le processus qui a abouti Ă  ce premier roman. Par exemple, en devenant Ă©crivaine, Marie Nimier rĂ©pondait-elle obscurĂ©ment Ă  la question provocatrice de son pĂšre (l’auteur cĂ©lĂšbre Roger Nimier): « Que dit la reine du silence ? » ? S’agissait-il de relever le dĂ©fi paternel ? Marie Nimier se souvient: « TrĂšs jeune, je me mis Ă  faire chambre Ă  part avec moi-mĂȘme, trĂšs jeune et jusqu’au grand plongeon dans la Seine. J’étais Ă  la fois la petite fille pleine de vie [
] et l’enfant grave qui s’ennuyait. » Cette tendance Ă  se sĂ©parer en deux est liĂ©e sans doute au dĂ©fi paternel devenu le dilemme de sa jeunesse: se taire ou Ă©crire ? S’agissant des InsĂ©parables Nimier dit que la narratrice et LĂ©a sont « Deux corps rĂ©els, deux corps fictifs, aussi, indissociables, insĂ©parables. » Ana de Medeiros montre alors que dans ce dernier roman, la scission psychique de Marie Nimier jeune se trouve reflĂ©tĂ©e dans les destins pas tout Ă  fait jumeaux de deux « insĂ©parables. »PrĂ©sentation de l'Ă©ditrice : Dans son article « Living to Tell the Tale : Marie Nimier and Autobiographical Writing », Eilene Hoft-March rappelle que la recherche psychologique confirme que la narration est un mode naturel et peut-ĂȘtre mĂȘme nĂ©cessaire du soi conscient, une façon de se voir en tant qu’ĂȘtre continue Ă  travers le temps. Elle remarque qu’en essayant de narrer un rĂ©cit autobiographique dans La Reine du Silence, Marie Nimier Ă©crit sur les difficultĂ©s de construire une histoire, ce qui semble indiquer de vrais difficultĂ©s quant Ă  la construction d’une identitĂ©. Eilene Hoft-March se penche alors sur l’aporie de la narration chez Marie Nimier qui perdure tout au long du livre et qui semble trouver son origine dans le dĂ©sir que l’auteur a de construire non pas un sujet biographique, mais deux, le sien et celui de son pĂšre cĂ©lĂšbre, Roger Nimier. Marie Nimier trĂ©buche plusieurs fois sur des invraisemblances entre les narrations d’elle mĂȘme qu’elle a Ă©crites auparavant et les donnĂ©es publiques qu’elle recherche et dĂ©couvre dĂ©sormais sur son pĂšre. L’écrivain ne cesse de chercher un moyen de remĂ©dier au problĂšme Ă©vident des versions incompatibles afin de trouver un moyen de rĂ©unir et la narration paternelle et celle filiale. En d’autres mots, Nimier construit un sujet reconnaissable en Ă©tablissant une continuitĂ© narrative non seulement Ă  l’intĂ©rieur d’un mĂȘme sujet, mais aussi d’un sujet Ă  l’autre.Chez Camille Laurens et Nelly Arcan, la littĂ©rature se fait "le tombeau de l'amour", tĂ©moignant de sa disparition progressive puis de sa mort, dissĂ©quant son cadavre afin de dĂ©terminer les causes du dĂ©cĂšs et de porter accusation contre les coupables. Au banc des accusĂ©s se retrouvent le dĂ©sir et la diffĂ©rence sexuelle, puisque hommes et femmes ne savent pas ou plus se dĂ©sirer. Dans les rĂ©cits d'Arcan comme chez Marie Nimier, le rapport pornographique a pris la place du rapport amoureux qui semble obsolĂšte — bien que les personnages fĂ©minins le recherchent toujours ardemment. Cette communication se propose d'Ă©tudier la mise en texte des ratages de l'amour dans quelques rĂ©cits de femmes contemporains afin de dĂ©gager les diverses articulations de l'amour, du dĂ©sir et de la diffĂ©rence sexuelle prĂ©sentes dans ces Ɠuvres, dans la visĂ©e d'interroger la portĂ©e sociopolitique de telles reprĂ©sentations de l'amour au fĂ©minin: la libĂ©ration des femmes peut-elle faire l'Ă©conomie du dĂ©senchantement? En un blog anterior (17.11.2009) escribĂ­ sobre “El Africano” (2003) de Le ClĂ©zio, Premio Nobel 2008, obra que busca comprender a un padre ya muerto y al que poco o nada se ha conocido. En esa misma lĂ­nea Marie Nimier, francesa como Le ClĂ©zio, escribe “La Reina del silencio”. El nombre de Marie Nimier no nos dice nada en Colombia; es mĂĄs, me atreverĂ­a a decir que en AmĂ©rica Latina tampoco es conocida. No sucede lo mismo en Francia. AllĂ­, cuando se pronuncian las dos palabras que componen su nombre y apellido, puede observarse una estela luminosa, seguida de un silencio respetuoso y bien merecido.Le jeu de La nouvelle pornographie se rĂ©vĂšle donc dangereux non seulement pour le personnage de l’écrivaine qui y prĂȘte son nom, mais aussi pour le lecteur. Avec son titre aguicheur et son premier chapitre osĂ©, La nouvelle pornographie fait semblant – mais semblant seulement – d’inviter une lecture "Ă  une seule main". Tout en empruntant le masque du pornographique, l’Ɠuvre s’en dĂ©tache, afin d’affirmer a contrario une critique du pornographique et de ce que la narratrice nomme "le grand dĂ©ballage" (NP: 110) de l’intime. Le rĂ©sultat est un texte hybride, qui pose beaucoup de questions et rĂ©pond Ă  cĂŽtĂ©. En cela, l’Ɠuvre de Nimier rejoint un courant contemporain identifiĂ© entre autres par Elisabeth Ladenson, qui rĂ©utilise des moyens pornographiques avec une visĂ©e autre (2004: 87). Depuis l'automne 2005 et sa rencontre avec Dominique Boivin, Marie Nimier travaille rĂ©guliĂšrement avec des chorĂ©graphes et des danseurs. Ainsi est nĂ© le spectacle À quoi tu penses ? (textes publiĂ©s chez Gallimard sous le titre Vous dansez ?), puis Les InsĂ©parables, lecture dansĂ©e (avec Claudia Gradinger), spectacle en tournĂ©e actuellement avec l'actrice Fanny Cottençon. Elle a collaborĂ© Ă©galement au dernier spectacle de Daniel Larrieu, LUX. Cette Ă©tude revient sur la genĂšse et la mise en forme du travail avec Dominique Boivin, et plus largement sur les rapports qu'entretiennent dans ce spectacle la littĂ©rature et la danse. Monologue intĂ©rieur, dialogue avec ses partenaires, examen de conscience, remise en question : l'artiste apparaĂźt ici dans sa grandeur et ses misĂšres, tandis que les pensĂ©es nourrissent son mouvement. Texte donnĂ© par les danseurs, texte tombant des hauts-parleurs; vidĂ©o live, images enregistrĂ©es : la voix dans À QUOI TU PENSES ? est une parole (...) qui s'anime par le corps du danseur. Elle ne raconte pas, mais incarne la pensĂ©e pour se faire corps. Le corps du danseur donne vie et corps Ă  la voix du texte. La parole ne remplace pas le geste, elle "se fait" geste, "parole incarnĂ©e".D'une maniĂšre documentaire, Marie Nimier explore l'autofiction, Photo-Photo appartient au genre, abandonnant la douteuse auto- biographie au profit d'une littĂ©rature hautement fictionnelle. L'auteur n'a pas Ă  dire la vĂ©ritĂ© des faits, mais utilise l'intime comme ressource sensible, et a le droit de mentir, d'inventer ou de mettre en place un dispositif donnant Ă  l'existence un contenu aussi immatĂ©riel que celui de l'Ă©criture romanesque. La structure de ce roman emprunte explicitement Ă  l'art contemporain, ou plus prĂ©cisĂ©ment Ă  la littĂ©rature d'artistes, que je diffĂ©rencie ici, par souci de cohĂ©rence, des Ă©crivains. Edouard LevĂ© est la figure que l'auteur convoque pour rassembler un itinĂ©raire distribuĂ© au hasard.Tant Marie Nimier que RaphaĂ«lle Billetdoux travaillent les appellations qu’avaient pour elles leurs pĂšres Ă©crivains pour reconstruire et peut-ĂȘtre inventer ces figures de pĂšres desquels l’une comme l’autre ont peut-ĂȘtre volĂ© ou tout au moins hĂ©ritĂ© la parole. Ce complexe travail de la filiation et de l’origine leur permet de traiter de la question d’avoir Ă©crit Ă  leur suite. Plan de l'article : Donner une figure au pĂšre : de la quĂȘte Ă  la rĂ©paration Le travail de filiation ou le dĂ©tour par l’autre pour revenir Ă  soiThe notion of crime crosses generic, disciplinary and cultural frontiers. In an era of identity fraud, eco-crime and global terrorism, this collection moves towards a reconsideration of crime in the French and Francophone literary and cultural imagination. How have our conceptions of'criminal'behaviour developed? How has the French genre of crime fiction, encompassing, but not limited to, the polar, the roman policier and film noir, evolved and reinvented itself?Je danse parce que je sais une chose : un corps est vivant et l'instant d'aprĂšs, il est mortLe journal de bord oppose au tragique ou Ă  l'oubli les Ă©clats de la vie la plus quotidienne, bribes triviales, cocasses, familiĂšres, tendres, qui sont ici autant d'obstacles et de barrages - jusqu'Ă  l'Ă©popĂ©e de l'impossible passage du permis de conduire qui riposte Ă  merveille au culte paternel de l'automobile. Voyage Ă  travers les Ă©poques, Ă  travers les Ă©tats d'Ăąme, voyage Ă  travers les corps : l'enfant, l'adolescente, la jeune fille, la jeune femme, la jeune mĂšre - jusqu'Ă  sa fascination pour les sirĂšnes : c'est Marie Nimier qui cherchait, Ă©videmment, Ă  se retrouver. Elle se tient toute droite au milieu de son livre. Les annĂ©es passant, je reste profondĂ©ment une romanciĂšre (quelqu'un qui lit des romans, qui en Ă©crit) mĂȘme lorsque j'aborde quelque chose qui peut apparaĂźtre comme un rĂ©cit ou mĂȘme un tĂ©moignage - au risque que le lecteur prenne pour argent comptant ce qu'il lit, sans en mesurer la part d'invention.I was, in a way, seduced into translating Nimier’s novel; it was like a temptation I could not resist, probably magnified by the taboo it represented for me. The questions examined in the following pages spring from the challenges I encountered during this process. However, before delving into the central translation discussion, I will first touch on two foregrounding topics, namely: the key terms “pornography” and “erotica” followed by a brief overview of the role of feminism in relation to the pornography debate. These preliminary considerations are offered as a kind of platform from which to contemplate Nimier’s novel as well as my translation commentary in which I zoom in on the erotics of reading, writing and translating and reveal the numerous difficulties faced during the translation process. La pornographie: un sujet qui interpelle. PassĂ©es les rĂ©ponses sous forme de projections individuelles, au-delĂ  de la prise de conscience de l’approche hermĂ©neutique qui, Ă  la maniĂšre d’un publicitaire, fait la promotion de la pornographie Ă©largissant sa signification au rang de symbole, de culte de notre sociĂ©tĂ©, si l’on s’interroge sur un tel choix, nous nous rendons rapidement compte qu’il n’y a pas un choix mais une dynamique de choix utilisĂ©e par Marie Nimier pour expliquer le mĂ©tier d’écrivain, et plus prĂ©cisĂ©ment le sien en accord avec elle-mĂȘme Ă  ce moment-lĂ  de sa vie de romanciĂšre et s’inscrire pour la premiĂšre fois dans « sa gĂ©nĂ©ration ». Avant de pouvoir adopter l’article dĂ©fini « la », pour son intitulĂ© « La Nouvelle Pornographie », elle aura dĂ©taillĂ© et cherchĂ© Ă  apprĂ©hender « une » pornographie particuliĂšre Ă  chacun. Du « je » aux « autres », de l’écrivain isolĂ© Ă  dessein « au lecteur privilĂ©giĂ© qui reprĂ©sente tous les autres », sans nĂ©gliger les « inconnus » qu’il aurait peut-ĂȘtre Ă©tĂ© « plus facile d’interroger », se dĂ©gage une notion de pornographie nĂ©cessaire tant pour justifier le personnage de l’écrivain qui va l’écrire sous nos yeux avec la plume de Marie Nimier qui se dĂ©voile Ă  son tour, que pour Ă©largir le sujet du roman lui-mĂȘme de ce fait ouvert. En comparant quelques romans de l’extrĂȘme contemporain français qui prĂ©sentent la figure du pĂšre, tant rĂ©el que fictionnel, cet article vise Ă  dĂ©jouer les mĂ©canismes d’une Ă©criture de la filiation dans les pratiques actuelles, notamment dans les choix de Marie Nimier. L’enquĂȘte et la rĂ©flexion mĂ©tascripturale accompagnent l’analyse des ellipses parsemĂ©es tout le long du texte comme graduelle prise de conscience d’une limite Ă  explorer et Ă  repousser continuellement au nom d’une sĂ©rie de tĂ©moignages tout Ă  fait extĂ©rieurs Ă  la relation entre pĂšre et fille dessinĂ©e dans La Reine du Silence. Cet aspect tend Ă  rendre explicite la difficultĂ© Ă  gĂ©rer la figure du pĂšre, en dĂ©voilant la technique du « gant » qui semble revĂȘtir un espace dĂ©fini Ă  priori et apparemment dĂ©jĂ  codifiĂ©, mais qui, au fond, n’habille pas l’écriture. L’exigence de crĂ©er des vides, la nĂ©cessitĂ© de jouer sur les prises de distance finissent par mettre au point des formes de renversements capables de questionner l’approche identitaire, souci particuliĂšrement Ă©vident dans la prose française d’aujourd’hui qui remet en cause toute dimension gĂ©nĂ©alogique, comme le tĂ©moignent, entre autres, Eau sauvage de ValĂ©rie MrĂ©jen, Le Cri du sablier de ChloĂ© Delaume et Mon pĂšre d’Éliette AbĂ©cassis.J’ai choisi de rĂ©aliser une sĂ©rie de pastiches sur un mode dual. Le principe de base consiste Ă  former des couples composĂ©s d’un auteur « classique » et d’un auteur contemporain. Ici, deux extraits des oeuvres de Marcel Proust et de Marie NimierThis article is the result of a seminar where le discours amoureux was examined in several twentieth century French novels. I focus on two of them: Le Coup de grĂące, by Marguerite Yourcenar, and La Nouvelle Pornographie, by Marie Nimier. A look at le discours amoureux in these novels demonstrates that the language of love is a problematic thing. However, in spite of the faulty or carefully circumscribed rapport between lovers or potential lovers, the elusiveness of fusional relationships, and the pervasive incomprehension between speaking subjects, these novels produce a surprising affirmation of the power of language and of writing to create a space, a discursive site, where singular individuals can meet authentically and where a fragile tenderness is possible. I propose that a necessary element of this precarious space is the condition of abjection as described by Julia Kristeva in Les Pouvoirs de l’horreur. Kristeva’s definition of the abject is compared to Nimier’s use of the term and Nimier’s conception of the truly obscene. Parallels are made between the loathing, treachery, and rejection Kristeva names as abject, and the behavior of characters in Yourcenar’s and Nimier’s novels. The contrast between the preverbal nature of the abject and the safeguard of literary form to frame and express it is presented with reference to Philippe Sollers’ novel, Portrait du joueur, and is related both to Kristeva’s concept of the abject and to its representation in the three novels. I conclude with the examination of the abject element characteristic of any literary work and of literature as the space where love and abject loathing are not mutually exclusive but are the double face of true intimacy.L’univers romanesque de Marie Nimier tĂ©moigne d’une narrativitĂ© rocambolesque, d’une hybriditĂ© gĂ©nĂ©rique, et de la mise en place d’un rĂ©alisme fantasmĂ© et racontĂ© par des voix narratives variĂ©es et amusantes. Avant la parution de La Reine du Silence en 2004, rĂ©cit explicitement autobiographique mais encore rĂ©cit sur son pĂšre, Roger Nimier, mort en 1962 quand Marie Nimier n’avait que cinq ans, le thĂšme de la paternitĂ© littĂ©raire joue un rĂŽle important, bien qu’en filigrane, dans les textes. À partir de la notion freudienne du pervers que Julia Kristeva Ă©voque et approfondit dans Le GĂ©nie fĂ©minin au sujet de l’Ɠuvre de Colette, cet essai explore le sens du pervers, ou pĂšre en vers, chez Nimier fille. En particulier, on peut discerner dans certains des romans de Marie Nimier la quĂȘte d’un nom de pĂšre sous forme d’enquĂȘte policiĂšre. Dans un renouvellement du genre policier, Nimier mĂ©lange l’hermĂ©neutique (la dĂ©duction raisonnĂ©e du dĂ©tective, le symbolique) et l’affectif (l’intuition, le sĂ©miotique) rĂ©alisant un polar sentimental et autobiographique qui s’apparente Ă  la cure psychanalytique. Le mythe d’ƒdipe joue ici le rĂŽle du moteur de la recherche.Depuis environ 1920 le paysage littĂ©raire français reconnaĂźt sous les traits du patronyme Nimier le grand romancier Roger Nimier. Il semble que dĂšs 1985 sa fille, elle-mĂȘme, offre son regard Ă  la physionomie de ce paysage : un regard ambiguĂ«, doublement jeune, de femme et d’écrivain. Je propose ici d’explorer comment cette derniĂšre Ă©volue dans l’univers de ses textes tandis qu’elle Ă©crit buste de sirĂšne, silhouette de femme, d’homme orchestrant de dos, corps gĂ©nĂ©rique reproducteur ou temporel, corps Ă©rotisĂ© jusqu’à se perdre dans le blanc de la page, confondant finalement corps et corps de texte. D’autre part je retracerai jusqu’oĂč, comme la plupart de ses personnages, en pleine mouvance, Ă©trangers Ă  toute ambition de dĂ©marche, ces textes lui sont devenus des prĂ©textes Ă  rĂ©-orthographier un prĂ©nom, un nom, son nom, ce patronyme Nimier qui, parĂ© d’une calligraphie de lettres nouvelles et de figures de style croustillantes, lui permettent de dĂ©couvrir son propre visage, mais aussi de faire dĂ©couvrir Ă  une gĂ©nĂ©ration nouvelle d’auteurs et de lecteurs un autre visage Nimier, le sien. Corps et visage s’apparentent ainsi Ă  l’écriture qui est devenue mĂšre porteuse d’identitĂ© et qui, chemin faisant, rivalisant de crĂ©ativitĂ© avec elle-mĂȘme pourra dans La Reine du Silence permettre Ă  Marie Nimier d’écrire une autobiographie qui lui accorde une double reconnaissance : la sienne et celle de son pĂšre. Pleins et des dĂ©liĂ©s dĂ©lient la langue de Marie, reine du Silence, qui enfin, Ă  la premiĂšre personne du singulier, pour sa gĂ©nĂ©ration et pour elle-mĂȘme peut rĂ©pondre Ă  la question maudite que son pĂšre lui posa lorsqu’elle avait cinq ans : « Que dit la Reine du Silence ? »This paper situates La Nouvelle Pornographie within the context of debates around the terms “women’s writing” and Ă©criture fĂ©minine, arguing that whilst her protagonist Marie is concerned with the articulation of a female eroticism defined in opposition to the male, Nimier herself offers us a model of “otherness” and desire which transcends simplistic gender binaries. I argue that through her use of the autofictional narrative voice Nimier explores writing as a site of self-transformation in which the author/narrator can act out alternative visions of her self. Through the relationships both between narrator and protagonist, and between Marie and Aline, Nimier explores a realm of ambiguity which is both pleasurable and disturbing, and within which gender roles can be enacted and ultimately subverted. Marie’s fantasies reverse the conventional gendered structure of desire, positing the female as active desiring subject and the male as passive object, before going one step further to suggest the possibility of a lesbian desire which transcends this gender binary. Thus, my reading of the text identifies Gabriel, the apparent object of Marie’s romantic desires, as in fact the point of articulation of a love triangle through which Marie’s desire for Aline is mediated. Through this triangular pattern of desire Nimier explores the pleasures of the ambiguous and the undecidable as the site of a jouissance which both excites and disturbs, and which gives the text itself its peculiarly seductive quality.Au grĂ© d’un parcours autobiographique, Marie Nimier dans La Reine du Silence explore cette rĂ©alitĂ© intraduisible qu’est le labyrinthe du deuil, de la mort. Dans une quĂȘte irrĂ©pressible de la survie, maniant la langue avec un humour et des images dĂ©capants, son salut est son style. Jouant sur le caractĂšre infini du langage, Marie Nimier impose sa griffe dans une danse sur la page, repoussant les frontiĂšres du tissu textuel. Dans un ballet de mĂ©taphores alliĂ© au vĂȘtement et au corps, le chemin de la reconnaissance passe l’isotopie de la sirĂšne, image d’un malaise sous-jacent amorcĂ© dĂšs SirĂšne, titre de son premier roman. Par l’exploration de l’écriture, la sirĂšne, Marine puis Marie, Ă  son corps dĂ©fendant, va prendre son envol et trouver son rĂ©seau aĂ©rien. PerpĂ©trant cet engrenage langagier de l’écriture, La Reine brise le Silence qui la tenait « prise au piĂšge de l’intelligence paternelle » (145). Le dĂ©fi est relevĂ©. En renaissant dans le texte, la sirĂšne s’est recomposĂ©e et peut Ă©crire en son nom, au nom de Nimier.Taking issue with those critics who suggest that Nimer’s latest work, La Reine du Silence, marks a break with the author’s existing corpus in that it (finally) confronts the figure of the father, this article regards La Reine du Silence as both an interpretive grid for reading Nimier’s earlier novels and a text which offers a degree of resolution in relation to previously represented engagements with the (absent) father in Nimier’s work. Drawing on Freud’s theory of the “family romance,” the article identifies, across the full extent of Nimier’s Ɠuvre, a series of points de re-pĂšre, figures of paternal authority, which are echoed at the level of the writing itself by a number of textual motifs. These figures bring about a splitting and a silencing of the narrators and protagonists, which can only be overcome, especially for the female protagonists, through the latter’s own acts of authorship.Marie Nimier’s funny and subversive book, L’Hypnotisme Ă  la portĂ©e de tous (1992), reads like a screenplay and was made into a movie (Dormez, je le veux! 1998). The novel is in direct dialogue with films as Patrice Leconte’s La fille sur le pont (1999), Catherine Breillat’s Romance (1999), Joseph Lewis’s Gun Crazy (1949), and Jean-Pierre AmĂ©ris’s Mauvaises FrĂ©quentations (1999). Nimier’s novel is stylistically filmic and treats the themes that appear in these films, namely, submission, sexuality, and violence. Nimier’s writing reveals that in discussing the subtle questions of power through passivity, subversive fantasies, and sexual domination, we must continue to interrogate the novel. Even if contemporary French literature is itself becoming more and more filmic and visually driven, the novel still offers unique possibilities for discussing and imagining changes in gender politicsComment en vouloir Ă  quelqu'un qui n'existe pas, qui ne vous manque pas, que l'on a proprement gommĂ© de sa vie ?Il existe peu d'Ă©tudes sur l'intime, l'intimitĂ©, l'intimisme. De ce constat est nĂ© l'ouvrage collectif composĂ© d'une sĂ©rie d'approches variĂ©es susceptibles de saisir l'intĂ©rĂȘt et la difficultĂ© de proposer une dĂ©finition de l'intimitĂ© et, plus particuliĂšrement, de l'intimitĂ© au 20e siĂšcle. PlacĂ©e sous le signe de l'interdisciplinaritĂ©, le volume rend compte de la polyphonie du thĂšme dans la rĂ©alitĂ© sociale, artistique et littĂ©raire du siĂšcle dernier. Son principal objectif est d'apprĂ©hender la (les) dĂ©finition(s) de l'intime que les crĂ©ations littĂ©raires et artistiques contemporaines proposent.Il existe peu d'Ă©tudes sur l'intime, l'intimitĂ©, l'intimisme. De ce constat est nĂ© l'ouvrage collectif composĂ© d'une sĂ©rie d'approches variĂ©es susceptibles de saisir l'intĂ©rĂȘt et la difficultĂ© de proposer une dĂ©finition de l'intimitĂ© et, plus particuliĂšrement, de l'intimitĂ© au 20e siĂšcle. PlacĂ©e sous le signe de l'interdisciplinaritĂ©, le volume rend compte de la polyphonie du thĂšme dans la rĂ©alitĂ© sociale, artistique et littĂ©raire du siĂšcle dernier. Son principal objectif est d'apprĂ©hender la (les) dĂ©finition(s) de l'intime que les crĂ©ations littĂ©raires et artistiques contemporaines proposentJ'ai dit que ce livre m'avait rendu Marie Nimier incroyablement proche. J'aurais pu dire, aussi, inaccessible. Comme peut l'ĂȘtre une petite fille qui se tait et vous regarde droit dans les yeux sans sourire. Curieusement, c'est exactement l'effet que me fait ce livre, une fois refermĂ©. Comme s'il Ă©tait elle. Comme si, d'avoir rĂ©ussi Ă  y faire exister cet homme brillant et paradoxal qui eut tant de mal Ă  ĂȘtre, pour elle, un pĂšre, son texte avait rĂ©ussi du mĂȘme coup Ă  incarner cette petite fille muette qu'elle Ă©tait en face de lui, " la Reine du Silence " comme il l'avait baptisĂ©e. Avec ce livre superbe dont on imagine qu'il marquera, dans son Ɠuvre, non seulement une pause comme elle le suggĂšre, mais un tournant, Marie Nimier rompt le charme oĂč l'enfermait la parole de son pĂšre et brise le silence dont on imagine qu'il fut, des annĂ©es durant, la prison transparente dont seule la littĂ©rature lui permettait de sortirHeureux lecteur qui va dĂ©couvrir Marie Nimier. Il apprendra d'elle, en petites phrases limpides et frappantes, que les hommes, les mouettes et les fars aux pruneaux n'arrĂȘtent pas d'entretenir Ă  leur insu des quantitĂ©s de relations insoupçonnĂ©es, fraternelles ou hostiles, sentimentales ou extravagantes.(...)



Responsable de la rubrique : Jeanne-Sarah de Larquier